Diversité et richesses de l’engagement chrétien

forum organisé par la Congrégation pour l’Éducation catholique

et par l’Observateur permanent du Saint Siège auprès de l’UNESCO

Paris UNESCO le 3 juin 2015

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– Les enjeux, les perspectives, les défis… diversité, universalité : valeurs partagées

Avec l’UNESCO, la délégation permanente du Saint-Siège auprès de l’UNESCO et la Congrégation pour l’éducation catholique, promoteurs de l’événement, ce forum a témoigné de diverses manières de l’engagement de l’Église au service de l’éducation, une priorité au service de l’Homme et pour la Paix et l’équité, porteuse de sens : témoignages concrets, éclairages conceptuels

Les propos introductifs ont mis en évidence toute l’importance du domaine éducatif, qui est une priorité pour l’Église – et qui l’a été de tout temps – mais aussi pour l’UNESCO, et, des communautés de vue essentielle comme, par exemple, la nécessité de s’ouvrir aux outils modernes (le numérique) l’accent mis sur l’ouverture aux autres et le développement des coopérations, le traitement des questions touchant à l’environnement.

Le cardinal Parolin, se référant à l’encyclique Popularum progressio, a rappelé ce que l’éducation apporte pour sortir de la misère, a souligné toute sa valeur – une valeur intrinsèque, vitale – et la diversité des champs qu’elle recouvre (alphabétisation, aide à l’enfance et soutien des femmes, formation permanente, enseignement et recherche)

Lire le texte intégral du discours du cardinal Parolin

L’Église puise la force de son engagement aux sources d’une longue histoire et d’un riche héritage de pensées : la Bible, les contributions des ordres monastiques, les encycliques… tout un patrimoine spirituel au service de l’humanité transmis d’âge en âge, qui invite toujours à dépasser les considérations excessivement réductionnistes et qui aide à donner du sens.

Forte d’un solide héritage, et avec une présence partout dans le monde, l’éducation chrétienne doit être de son temps, et faire face aux défis de l’époque : dans un monde où s’entre choquent les effets d’une mondialisation qui aplanit (sous couvert de rationalité) et d’une diversité culturelle quand même toujours manifeste, c’est en mettant l’homme au cœur des projets éducatifs que peuvent s’apaiser les éventuelles tensions, dès lors qu’on s’ouvre à l’autre, et qu’on va au-delà d’une vision étroite (les expertises techniques, les compétences) et qu’on donne à l’humain sa juste place ; il faut donc des approches élargies, où l’on sait cultiver le respect des personnes, avec leurs talents et leurs faiblesses, où l’on ne perd pas de vue ce qui aide à structurer et épanouir : l’histoire, les arts, et plus généralement tout ce qui peut élever l’âme, éveiller et/ou ouvrir sur les merveilles de la nature. Alors que les tensions sont partout présentes, le monde de l’éducation doit promouvoir des communautés harmonieuses, conviviales, ouvertes à l’autre, reconnaissant les différences mais capables aussi de partager des objectifs communs et de développer ainsi des coopérations fructueuses.

Abattre les murs et bâtir des ponts : deux images données pour figurer ce à quoi doivent s’employer les acteurs de l’éducation, porteurs des valeurs chrétiennes.

Mgr Follo, observateur permanent du Saint-Siège à l’UNESCO, évoque l’éducation comme un parcours de formation à l’être, comme étant une formation intégrale, assurée par les maîtres, interculturelle, globale… reposant sur une philosophie qui n’oublie pas sa finalité, danger d’oubli que pointait Jacques Maritain : l’éducation n’est pas un « process », pas non plus un domaine qui se limiterait à l’utilisation d’outils… il faut aller au-delà : transmettre un savoir, ouvrir ses horizons, la dimension de l’infini, le rapport aux autres… et, au travers de l’expérience, de l’exemplarité ou de la réflexion intérieure, faire découvrir une réalité totale, discernant ainsi ce qui permet de se réaliser, ce qui peut donner sens à la vie de chacun, avec et pour les autres, en un enrichissement fécondé par les bienfaits de l’accueil et de la rencontre.

Un débat a conclu la matinée pour approfondir les défis de l’éducation, avec un échange entre le Dr Tang Quian, DG adjoint de l’UNESCO et le Pr Verback pour la Congrégation pour l’éducation catholique.

– Expériences sur le terrain, vision politique, engagements d’Église, engagement de la société civile

L’après-midi, trois panels ont enrichi l’échange au travers de retours d’expériences, d’analyses conceptuelles : autant d’éclairages (une douzaine) – d’origines géographique et de profils variés – venant illustrer et compléter les propos entendus en matinée.
Panel 1 : Expériences et appréciations venant de cinq continents

Europe (Italie) : Le principal du Lycée San Carlo de Milan a exposé le projet éducatif de ce collège catholique ; l’enseignement est inscrit pleinement dans les références que donne Jésus Christ, mais tous les élèves ne sont pas forcément de confession catholique : on respecte l’autre ; c’est un établissement qui vise l’excellence, mais la bienveillance aussi : attention à ceux qui ont des difficultés ; on y est attaché aux traditions (les humanités), mais aussi à ce qui relève de la modernité, en particulier pour ce qui est des outils (le numérique) ; les théories et les domaines plus pratiques sont également traités ; s’agissant des méthodes, l’accent est beaucoup mis sur le dialogue, l’interactivité, le travail en groupe. On ne néglige pas les disciplines artistiques et sportives, on incite les élèves à méditer, à comprendre le monde, à développer un esprit de curiosité et on les invite à cultiver ce qui relève de l’esthétique, ce qui peut paraître beau en tout domaine, avec cette part de mystère et de merveilleux qui renvoie à la recherche de Dieu, et à la question de la Création. S’agissant des comportements, une certaine rectitude est demandée, qui n’est pas de la rigidité, la fraternité doit inspirer les relations, mais sans que cela aille trop dans l’effusion ou un excès de cordialité (le professeur n’est pas un « copain ») : il faut un respect mutuel juste à tous les niveaux et quelles que soient les origines.

Dernier point important : sont multipliées les occasions de rencontres avec des responsables de la Cité, et les initiatives en faveur des plus faibles (handicapés, entraide, projets humanitaires)

Afrique (Cameroun) : le réseau BLAS (Bright Light and Smile)

C’est une association qui vise à promouvoir le droit à l’éducation, à sensibiliser les dirigeants à ce sujet, à surveiller la mise en œuvre des politiques.

L’objectif – souvent un défi – est tout à la fois quantitatif – faciliter l’accès à l’éducation pour tous – et qualitatif – permettre que soient promus des enseignements suffisamment complets.

L’organisation bénéficie du soutien de l’UNESCO, cherche à prendre appui sur la société civile (ONG) ; elle comporte un observatoire des pratiques qui conduit diverses études (comparatives notamment), elle travaille en réseau, œuvre à la sensibilisation des jeunes, la formation des leaders (dirigeants), l’éducation par le net.

– Amérique du Sud (Argentine) Réseau de soutien et de solidarité en faveur de l’éducation des jeunes (CLAYSS, Centro latinoamericano de aprendizaje y servicio solidario)

– Dans les initiatives prises par cette association qui intervient au-delà de l’Argentine, l’accent est mis sur l’univers du sensible et le sens du concret ; l’accès à l’éducation est par exemple plus facilement donné par le biais du sport (par exemple, on part du football, jeu collectif bien connu des enfants), et de l’art, cela facilite tout à la fois la découverte du travail en équipe (dimension horizontale) et de valeurs qui sont plus de l’ordre du beau, de l’esthétique et de l’harmonie qui élèvent l’âme (les arts) ; on cherche ainsi collectivement à nommer les choses, pour amener l’enfant à penser ce qu’il fait, ce qu’il ressent.

– Les technologies de l’information sont mobilisées, avec l’aide des professionnels qui, par exemple offriront leur service pour équiper les classes.

– Europe (Italie) : réflexion sur le contenu des programmes éducatifs et les risques de dérive (Pr Bruni, Université LUMSA – Libera università Maria Ss Assunta – Rome)

Il faut prendre conscience de la montée en régime d’une pensée très inspirée des préceptes idéologique du capitalisme ou de la finance ; l’éducation risque alors d’être trop unilatéralement orientée, avec une pensée standard, la disparition de la diversité des modèles économiques et sociaux, une approche des domaines uniquement utilitaire, technique… c’est une tendance pernicieuse qui fait fi des particularités contextuelles, et qui peut poser un problème pour permettre les débats, notamment le débat démocratique.

Seconde préoccupation, liée à ce qui précède, les incitations perverses : notamment dans la finance, avec une légèreté coupable, on a développé des mécanismes de rémunération fondés sur de fausses apparences de rationalité ; l’explosion de certains revenus a amené des comportements pervers, un décentrage par rapport à certains fondamentaux, une rupture d’harmonie, une idéologie délétère qui lamine et peut provoquer un choc anthropologique menaçant pour l’éducation et la société.

Dans ces conditions, en effet, on doit se demander ce que devient l’éducation, ou comment maintenir une éducation digne de ce nom, respectant les personnes, les valeurs éthiques ; comment peuvent évoluer les motivations intrinsèques des étudiants et enseignants avec ces dérives ? Une réponse, sous l’angle de l’éducation, «  la » réponse est certainement à trouver du côté de l’esprit de solidarité, et d’une meilleure entente entre les personnes : davantage de communion et de solidarité nous est il proposé en conclusion.

– Amérique du Nord (États-Unis) : la formation des dirigeants d’établissement (Université Fordham, université jésuite de New York)

Témoignage sur un institut de formation qui forme les responsables d’établissements suivant les valeurs chrétiennes ; il y a d’abord le souci d’assurer un enseignement de grande qualité ; les étudiants viennent de tous les horizons, et parfois de loin ; particularité de certains modules : les problématiques sociétales, le multi culturel ou le « multi linguistique ».

Les disciplines enseignées ou « travaillées » sont nombreuses, qu’elles soient académiques ou pratiques.

Les programmes concernent tous les niveaux (de la petite enfance aux adolescents et étudiants), une formation au leadership est assurée ; les formations font l’objet d’une certification.

Une attention particulière est prêtée aux aspects concrets : les analyses de cas, la répartition entre travail théorique » et « aspects pratiques », « l’école comme lieu de rencontre », « enseignement durable », « exercice de l’autorité ».

L’Institut mise aussi beaucoup sur l’ouverture : visite dans les quartiers, rencontres à l’étranger, partenariat et coopérations à l’international
Toutes les actions sont conduites avec le souci des valeurs chrétiennes de justice et de fraternité.

Europe et international : engagement social des universités catholiques (devise de la FIUC, Fédération internationale des universités catholiques : Sciat ut serviat, Savoir pour servir)

La Fédération internationale des universités catholiques encourage les initiatives qui, selon un mode transversal, amènent à sortir de logiques qui seraient par trop ancrées dans un « idéel » quelque peu désincarné, et enfermant ou enfermé. Sont ainsi encouragées toutes les initiatives permettant de traiter par la rencontre avec l’autre de questions sociales ou sociétales aussi sensibles que celles ayant trait à la pauvreté, la famille, la jeunesse… il s’agit de bien de prendre conscience qu’au-delà de la matière étudiée, analysée il y a le monde réel, avec ses diversités, ses inégalités, ses difficultés : au travers de projets très concrets menés souvent avec le concours des acteurs sociaux, l’objectif est d’apporter sous des formes diverses un concours d’expert à diverses communautés, comme par exemple les actions de sensibilisation à l’usage de l’eau en Amérique du Sud ou l’organisation de débats entre chercheurs et dirigeants politiques en Indonésie sur le traitement de la toxicomanie ; toutes ces expériences de terrain au service des personnes apportent aussi en retour : il y a un bénéfice en termes humanistes et par rapport aux valeurs chrétiennes qui enrichit les enseignements donnés.

Panel 2 : L’éducation, l’ouverture à l’international, les pouvoirs publics : l’engagement gouvernemental
Un autre regard : contributions données par plusieurs ambassadeurs délégués auprès de l’UNESCO
Grèce

Dans notre monde fait de tensions, marqué par l’invasion d’un monde virtuel souvent violent et une perte de beaucoup de repères, il est important de se rapprocher pour apaiser, concilier et mieux s’entendre… La diplomatie doit jouer son rôle, et le levier de l’éducation est ici essentiel, avec des problématiques qui sont de plus en plus internationales ; l’UNESCO ici joue pleinement son rôle en la matière.

Les États doivent investir massivement le domaine de l’éducation en s’efforçant de ne pas verser dans des approches trop « technicistes »  qui appauvriraient : il faut garder à l’éducation sa dimension humaniste… ne pas avoir le culte de l’économisme, c’est une aptitude à spéculer au sens « penser » qu’il faut savoir développer, plutôt que de magnifier ce qui a trait à la spéculation au sens financier. Finalement, Il faut placer les ambitions à un haut niveau, elles sont de l’ordre de l’immatériel, et non de « la vie basse » et en même temps se souvenir du sage de l’Antiquité qui prenant conscience de l’étendue de son ignorance, appelait à la modestie.

Le Bénin

– Une vision positive :il faut mesurer tout le chemin parcouru au fil du temps ; d’immenses progrès ont été réalisés pour réduire l’analphabétisme, l’obscurantisme, l’intolérance avec des contributions décisives d’organismes comme l’UNESCO et aussi les Églises par ses messages et aussi ses écoles qui ont contribué à nourrir une pépinière de dirigeants et entretenir une infrastructure socio-éducative.

Le Quatar

L’éducation est considérée comme une priorité absolue : c’est l’expression d’un engagement en faveur de la Paix, et une réponse d’apaisement à toutes les provocations pouvant venir d’un islam dévoyé.

Au cours des dernières années, dans le cadre d’une stratégie ambitieuse suivie au plus haut niveau, des actions nombreuses et marquantes ont été conduites : création d’une cité de l’éducation avec la participation de huit universités étrangères (6 américaines, une anglaise et HEC, chacune d’entre elle prenant en charge un domaine particulier) ; depuis 2008, pour accompagner une démarche stratégique à l’horizon 2030, tenue chaque année d’un sommet de l’innovation « WISE », forum d’échanges d’idées et de partage autour des bonnes pratiques et des innovations relevant de l’éducation ; attribution chaque année d’un prix décerné à des promoteurs de projets créatifs ; depuis 2004, sous la direction d’un professionnel du journalisme, développement d’une plate forme d’échanges entre « jeunes universitaires et collégiens » sur des thèmes divers (ex. : combattre les extrémismes, la question du pétrole au Moyen-Orient…), avec, après chaque moment de dialogue sur le thème choisi, un vote : l’objectif est de favoriser une culture du débat.

Le Quatar soutient aussi des programmes éducatifs (le chiffre de 5 millions de personnes à en avoir bénéficié est mentionné).

En conclusion, quelques considérations sont exprimées à propos des Traditions, du Coran et des Écritures saintes (les Livres), qu’il faut savoir bien exploiter en y ayant accès de façon responsable, avec la médiation de professeurs (terme employé) qui doivent rester authentiques et apaisants : le fanatisme ici est à exclure.

L’Équateur

L’éducation libère, elle ouvre les regards, et réduit l’ignorance… elle peut être dérangeante, mais cela n’a pas d’importance si elle contribue à diffuser des valeurs humanistes et à améliorer le bien être de la société. Il y a en ces domaines une dimension politique, on doit à cet égard opter résolument pour des orientations qui permettent d’ouvrir réellement l’accès à l’éducation à tous, et singulièrement aux plus pauvres. Si, dans cet esprit, les écoles catholiques apportent pleinement leur contribution à cette éducation pour tous, il y a en revanche des tendances moins heureuses lorsque se développent des initiatives privées, largement gouvernées par des considérations « marchandes » : les pouvoirs publics doivent faire en sorte de ne pas laisser cette « séquestration » de l’éducation, avec éventuellement certaines dérives éthiques.

Panel 3 : Éducation demain
Les grands enjeux de l’éducation (contribution LUMSA, Rome)
Se posent encore de nombreux problèmes, ceux-ci diffèrent selon les niveaux de développement.

Du côté des pays riches, la question majeure est celle de la finalité, les écoles tendent à devenir des centres d’apprentissage au service des intérêts économiques où l’on privilégie l’utilité, la rentabilité, un certain conformisme ; les valeurs mises en avant ont beaucoup de rapport avec la compétition, le mérite, « la performance, le succès avant tout », on tend à oublier de questionner le sens de ce qu’on fait.

Du côté des pays pauvres, le problème essentiel est simple : on manque de tout, pauvreté matérielle et immatérielle, avec alors de grandes difficultés pour permettre l’émancipation des personnes, des enfants au premier chef.

En réalité, sous des formes différentes partout émergent les mêmes sujets de préoccupation pour l’éducation : l’enfant qui n’est pas (plus) assez considéré, soit parce que sa formation est tributaire de conditions économiques (« l’argent » pour les pays riches) soit qu’il en est privé dans une large mesure (dans les pays pauvres, l’enfant exploité comme un résidu) ; mais il y a aussi d’autres phénomènes observés mondialement qui nuisent au développement d’une éducation pour tous, réellement valorisante avec comme un conditionnement des esprits que proposent nos modèles de société orientés vers la consommation ou une large diffusion télévisuelle faite davantage pour divertir ou aider à oublier des situations de dépendance ou de vulnérabilité que pour élever l’âme.

Les défis restent immenses : il y a encore des centaines de millions d’analphabètes, et les pressions utilitaristes, avec la montée de conceptions mercantilistes, érodent insensiblement le sens de l’humain, et appauvrissent les niveaux d’accès à la culture. C’est à ces réalités que doivent se confronter les acteurs du monde éducatif, avec, une attention aimante pour l’enfant et un sens des responsabilité qui puisse assurer aux jeunes – et notamment aux plus pauvres d’entre eux –des horizons d’avenir épanouissants, porteurs de promesses pour eux à titre personnel mais aussi au service de la cité et pour l’intérêt commun ; cette éducation doit contribuer à former de futurs citoyens, en les éveillant aux valeurs éthiques et en les habituant au dialogue avec les autres en complément des enseignements sous forme de cours.

– Apprentissage de la solidarité et culture de fraternité (réseau CLAYS)

Ici, le propos rejoint ceux tenus par d’autres intervenants : trop souvent encore, l’éducation est comprise et appliquée avec une vision étroite, réductionniste, utilitariste ou encore trop éloignée du terrain pratique, on a alors des orientations issues de rapports trop éloignées des attentes, ou ignorants de certaines valeurs profondément humaines ; tels sont les risques, et ces risques peuvent se trouver plus accusés là où les besoins sont les plus grands, dans les régions ou les pays les plus pauvres.

Des moyens existent pour atténuer les difficultés, des expériences sur le terrain sont là pour en attester et pour rappeler que le succès dépend souvent d’une suffisante prise en compte de ce qui vient de la base (« bottom up approach »), et aussi d’un apprentissage et d’une pratique du service sociale ou solidaire.

Les initiatives du réseau CLAYS répondent à cette logique et donnent de bons résultats ; ainsi en est-il d’un enseignement qui amène les élèves à développer une petite agriculture, jusqu’à la vente du produit de leurs récoltes : leçon de choses et d’économie; autre exemple cité, des classes techniques où l’on apprend à monter des sièges pour les handicapés : découverte de ce qu’est le handicap, apprentissage technique, production d’outils de locomotion au service de l’autre.

Ces initiatives originales, menées dans des zones défavorisées, réussissent parce qu’elles renvoient à du concret, tout en étant pilotées et accompagnées d’un enseignement par les maîtres qui jouent un rôle essentiel, pour expliquer, discipliner les efforts et montrer les apports de ce que font les élèves,  «  apports au service de » ; l’objectif est de pouvoir ainsi motiver les élèves, les rendre actifs, et faciliter l’insertion de ceux que pourraient rebuter les cours essentiellement magistraux. Mais il y a aussi, au-delà de l’apprentissage technique, une orientation vers les questions de solidarité avec d’évidentes retombées positives.

Mais cette attention aux autres, aux classes les plus défavorisées n’est pas limitée aux plus jeunes : il y a maintenant aussi beaucoup d’innovations « sociales » dans l’enseignement supérieur (encouragement des étudiants à faire du bénévolat, des diplômes conditionnés à un service social etc.)

« On ne peut pas changer le monde si on ne change pas l’éducation » (le pape François) : les initiatives qui nous ont été rapportées, avec de plus en plus d’attention apportées aux questions touchant la solidarité, sont le signe de changements qui donnent des résultats, une réelle transformation.

Conclusion
Card. Grocholewski, Préfet de la Congrégation pour l’éducation catholique

Même si en matière d’éducation on a beaucoup progressé (taux de scolarisation, alphabétisation) – ce dont il faut se féliciter car c’est un bienfait pour les populations -, on doit faire face à plus de complexité et relever de grands défis : la pauvreté qui constitue un frein au développement éducatif, les classes surchargées, les taux d’abandon et le manque de ressources aussi bien au niveau des matériaux éducatifs qu’en termes d’enseignants. Il faut réagir et, dans cet esprit, l’Église sera toujours présente pour aider la société terrestre et promouvoir la Personne, au travers de ses écoles et ses universités, au service d’une éducation qui permette à l’Homme non pas d’avoir davantage mais d’être plus, et qui soit résolument tournée vers l’autre, attentive à l’autre, et tout particulièrement aux plus pauvres. Par le réseau de toutes ses institutions culturelles, l’Église œuvre activement pour favoriser l’éducation avec le respect d’un ensemble de valeurs – la dignité des personne, la protection, le partage équitable, la recherche de la Paix – qui rejoignent celles qui peuvent émaner des multiples initiatives de l’UNESCO en ce domaine.