Un écrivain engagé au service de la Liberté… richesse d’une Pensée… européenne… humaniste…
l’auteur de toute une œuvre inspirante, ancrée dans son époque…
et en même temps étonnamment moderne, comme le suggérait d’entrée le titre de cette rencontre organisée sous l’égide de la
Commission nationale Française pour l’UNESCO.


L’événement s’est tenu le 22 juin 2017. Il s’inscrit dans le cadre du programme des anniversaires que l’UNESCO promeut pour célébrer la mémoire de grandes figures de l’histoire des cultures. En l’occurrence, c’est à l’occasion du bicentenaire de la mort de Germaine de STAËL qu’a été organisée cette journée d’échanges. M. JANICOT, président de la Commission nationale française et la Directrice Générale de l’UNESCO, Madame BOKOVA dans leurs propos introductifs ont d’entrée mis en évidence cette figure qui, par son œuvre, ses combats, son rayonnement fut productrice d’une pensée marquante, et qui aura été militante de grandes causes pour aider à plus de justice et d’harmonie : la cause des femmes, l’équilibre des pouvoirs, l’invitation au dialogue, le respect et l’écoute de l’autre et, par-dessus tout, la liberté.

Monsieur M. WORBS, président du Conseil exécutif de l’UNESCO, a souligné une personnalité qui par ses origines et sa vie, ses rencontres, ses voyages, ses œuvres, peut être considérée comme un symbole de la culture européenne, et qui dans l’histoire des idées a montré toute la richesse qu’apportent les dialogues interculturels, révélateurs de différences qu’il faut savoir reconnaître.

La discussion a été ordonnée autour de deux thèmes : « Germaine de STAËL  actualité d’une femme de lettres », et « Germaine de STAËL, actualité d’une européenne engagée ».

En réalité, les échanges, nourris par les contributions d’une quinzaine de participants à ces deux tables rondes, ont montré à quel point les deux dimensions, celle de la littérature et celle de l’Europe, non seulement apparaissent d’actualité mais aussi se trouvent très entremêlées. De plus, à l’écoute des orateurs, et aussi en entendant la lecture de quelques écrits, donnée par des élèves du lycée franco-allemand de Buc, école associée de l’UNESCO, on aura entrevu d’autres idées défendues par Mme de STAËL de portée universelle, comme tout ce qui a trait à la place de la femme dans la société, au bénéfice des confrontations pacifiques, ou aux apports de l’art et de la poésie.

Retenons, en complément, quelques autres réflexions :
Mme de STAËL fille de M. NECKER qui a connu et commenté le temps de la Révolution a aussi été une opposante résolue de NAPOLÉON, ce qui lui valut l’exil.
Elle a excellé dans tous les genres de l’écriture (roman, théâtre, essais…)
Dans ses œuvres purement littéraires – notamment Delphine et Corinne ou  l’Italie – un peu à l’image de sa Personne, elle ne s’en tient pas à des écrits neutres. Il y a toujours présente l’idée que la littérature a une dimension politique et qu’on peut y véhiculer les idées auxquelles on croit, et qui peuvent avoir une influence. Elle l’écrit dans un essai consacré à la littérature.
Dans ses œuvres comme dans sa vie – ses voyages, la tenue de son salon à COPPET en Suisse ou ses rencontres à Paris et dans de nombreux pays européens – elle a toujours manifesté une grande ouverture d’esprit et a pu ainsi croiser ses vues du Monde avec de nombreuses figures de la culture européenne comme GOETHE, HEINE, Benjamin CONSTANT, CHATEAUBRIAND, GIBBON.
Son essai « de l’Allemagne » est l’une de ses grandes œuvres, qui aura été en son temps une révélation pour les français, à qui Madame de STAËL présente leur voisin de façon positive et en montrant bien les différences entre les deux pays… Ceci lui valut une critique sévère (« cet ouvrage n’est pas français » lui avait on fait savoir), et la censure : 10000 exemplaires mis au pilon, (le livre sera publié finalement plusieurs années après, en Angleterre).

M. Marc FUMAROLI nous aura montré la complétude de cette somme qui a nécessité six années de travail – y sont traitées les questions politiques, artistiques, philosophiques religieuses notamment – et tout l’apport de l’analyse comparée qui fait ressortir ce qu’est l’esprit français face à ce qu’on pourrait appeler le génie germanique.
Même si le texte peut être jugé quelque peu apologétique, ce qui explique la polémique qu’il a suscitée en France, il est aussi à voir comme l’expression d’un éloge de la différence ou de la diversité, que Mme de STAËL ressent comme une richesse, avis qui n’était pas unanimement partagé à l’époque.

M. DARCOS a repris quelques termes caractérisant bien ce qu’a été Mme de STAËL : la dualité (d’autres orateurs ont parlé de mixité), avec constamment une co-existence de la raison et de la passion ou des sentiments, mais aussi l’insistance sur l’expérience ou les circonstances (la vie, le concret) et sur la réflexion, les principes. La transmission d’idées auxquelles elle est très attachée, comme la promotion du débat (et une opposition radicale aux régimes totalitaire), une théorisation de la littérature. Un essai lui permet de voir la littérature à la fois comme une œuvre de l’imagination et de promotion d’idées à défendre : fiction et plaidoyer.

On a aussi évoqué Jean Jacques ROUSSEAU qui a beaucoup influencé Mme de STAËL, mais pas au point d’adhérer à toutes ses idées.

Autres idées qui l’imprègnent : le refus des dogmatismes, la contestation de l’esprit de système, les excès de pouvoir par trop unitaires et centralisateurs, la place de la femme dans la société qui doit être égale à celle qui est faite à l’homme…

A l’évidence, Madame de STAËL était en avance sur son temps. Elle était une personnalité forte qui était habitée de nombreuses idées que l’on retrouve promues par l’UNESCO et qui font l’essence de l’Humanité : La reconnaissance de l’autre, le respect mutuel, la diversité, la liberté, la tolérance, la Justice et la Paix.