Colloque au Sénat le jeudi 12 avril 2018

« Citoyenneté et Justice  : un défi pour le Moyen Orient
Quel enseignement pour l’avenir de l’Irak ? »

le jeudi 12 avril 2018


De l’importance du respect et de la tolérance. Savoir pardonner mais tout ne peut rester impuni. Une issue favorable de toute démarche pour une réelle réconciliation doit venir des Peuples concernés. Pas d’ingérence extérieure et nécessité d’un ancrage dans les valeurs culturelles qui sont les leurs. Exigence aussi de séparation entre ce qui est politique et le domaine religieux.

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Le CCIC faisait partie des invités à ce colloque organisé au Sénat après une mission en Irak et au Liban de sénateurs français, conduite par M. Bruno Retailleau, sénateur de Vendée.

Comme l’indique le programme, la qualité des intervenants ne permet guère de faire un compte rendu exhaustif et précis de cette journée très riche en informations.

C’est ainsi que des représentants politiques et religieux du Moyen Orient, ont témoigné de leur expérience pour tenter de définir les moyens de sortir de la situation actuelle de violences, et notamment religieuses, dans laquelle se trouve l’Irak, au sortir de la défaite de Daech et de l’État Islamique.

Les échanges ont été structurés selon trois axes de discussion :

  • Citoyenneté et Religion
  • Citoyenneté et Politique
  • Justice et Réconciliation

En voici les éléments les plus saillants :

Au plan religieux

Il est fondamental et prioritaire de séparer le religieux du politique, et de respecter la liberté d’appartenance et d’exercice sans contrainte extérieure de chaque religion et communauté de pensée. Les membres de chaque religion ont vocation à rester sur les terres qui les ont vu naître, ainsi que leurs familles, sans discrimination, et encore moins sans pression à l’exil.

La question de l’enseignement des religions doit être redéfinie, de telle sorte que l’état ne puisse seulement qu’en rappeler l’existence mais sans aucun jugement d’exclusion ou de valeur.

L’enseignement religieux et les formations spécifiques afférentes sont du seul domaine de la religion choisie, et doivent rester respectés de tous.

Au plan politique

Il convient d’instaurer un régime politique où tous les courants, ethniques ou religieux soient respectés : chrétiens, musulmans, chiites, sunnites, yézidis, kurdes, juifs… de même que l’égalité homme/femme.
A cet égard, il faut veiller aux concepts, par exemple à celui de démocratie, dont l’acceptation occidentale ne correspond pas à la réalité sociologique des pays du moyen Orient.

Les expériences récentes ont montré que la volonté d’instaurer par la force des régimes politiques d’exception fondés sur une pensée monolithique ne conduit qu’à des dictatures violentes et éphémères.

Sur ces deux plans, l’exemple du Liban a brillamment été développé par M. Antoine Messara, membre du conseil constitutionnel du Liban, et titulaire de la chaire UNESCO d’études comparées des religions, de la médiation et du dialogue, et de l’Université Saint Joseph de Beyrouth.

A plusieurs reprises, dans les débats, il a été rappelé qu’en dépit de certaines déclarations plusieurs pays du Moyen Orient, qui se prévalent d’une organisation politique ouverte, disposent encore dans leurs constitutions ou leurs lois fondamentales d’éléments religieux explicites ou implicites en référence à la charia. (Égypte par exemple).

Au plan de la réconciliation et de la justice
L’expérience montre qu’il n’est guère possible de retrouver ou de créer un « vivre ensemble », après de graves violences subies, sans opération de justice, de pardon et de réconciliation. Aucune de ces étapes ne peut être gommée. Plusieurs intervenants ont fait référence à la réconciliation des peuples en Europe après la seconde guerre mondiale, réconciliation qui a été précédée de jugements prononcés par la Cour de Nuremberg.
D’où de nombreux développements et considérations sur des structures judiciaires à mettre en place, en vue de traiter les crimes contre l’humanité, ce qui est peut être comme un préalable ou une condition pour parvenir à une véritable réconciliation.

Tels sont les trois volets incontournables pour l’instauration d’une paix durable en Irak.

A noter également la mise en garde de plusieurs orateurs sur la nécessité d’éviter, dans ce processus, toute ingérence extérieure au peuple irakien.

Denis Chaigne

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