Selon l’usage, la Directrice générale de l’UNESCO, Mme Azoulay, a introduit la session avec une présentation synthétique des activités récentes et à venir de l’institution en mettant l’accent sur quatre enjeux principaux et les défis qui y sont associés. A l’approche de la Conférence générale, tout en exprimant des vues finalement plutôt positives sur l’état de la situation, elle n’a pas occulté les difficultés, ce qui l’a amenée à conclure son intervention par un appel aux États pour qu’ils restent pleinement mobilisés au service des missions de l’UNESCO et en soutien des opérations engagées qu’il s’agisse des programmes ou des réformes.
En guise d’introduction, Mme Azoulay rappelle les catastrophes naturelles récentes, les attentats et une violence persistante un peu partout, et les retards que prend l’agenda 2030 notamment dans sa partie Éducation, un constat qui doit interpeller la famille UNESCO, pour donner des réponses autour de quatre enjeux, avec un engagement fort que l’on doit trouver au travers d’une stratégie bien définie et de budgets cohérents par rapport aux objectifs poursuivis.
Quatre enjeux essentiels
L’Education
A New York, l’Assemblée générale de l’ONU a fait le constat d’une situation très préoccupante notamment en Afrique (257 millions d’enfants non scolarisés, 1 jeune sur 6 qui ne sait pas vraiment s’intégrer dans les systèmes, non respect de l’ODD4). Il y a un énorme besoin de ressources pour combler les retards si l’on veut des progrès significatifs (les besoins se chiffrent en dizaine de milliards de dollars par an).
Devant cette prise de conscience de la communauté internationale, on a confirmé le rôle de l’UNESCO comme chef de file sur le sujet, on a décidé de lancer une Coalition pour parfaire le suivi statistique de ces questions, l’ISU étant confirmé dans ce rôle. Il a aussi été décidé de créer un Groupe de Haut niveau qui devra accompagner les réflexions sur l’avenir de l’Éducation.
L’UNESCO va rester très engagée sur plusieurs sujets sensibles où les lacunes criantes justifient des initiatives fortes : l’éducation des migrants et populations déplacées, la question de l’insertion des femmes et jeunes filles, l’alphabétisation des jeunes et des adultes (avec le soutien d’une Alliance d’États), l’utilisation du numérique et notamment de l’Intelligence Artificielle.
L’Information
L’UNESCO entend défendre la liberté d’expression si mise à mal sur les réseaux sociaux en prenant de nombreuses initiatives de nature à faciliter l’organisation de débats intellectuels dignes de ce nom, nourris par une diffusion et un traitement de l’information non faussés, où les journalistes et éditorialistes ne sont pas menacés ou soumis aux affres de la censure et des pressions de toutes sortes.
Il importe aussi de favoriser les accès à l’information et cela passe notamment par une réduction de la fracture numérique dans de nombreux pays (manque d’infrastructures, de compétences mais aussi attention insuffisante apportée à l’utilisation des langues autochtones).
Parmi les actions engagées, on a cité : une semaine du codage organisée au profit de dix pays africains, les initiatives prises dans le cadre de l’année des langues autochtones (2019), la journée mondiale de la liberté de la presse avec, à cette occasion, le lancement d’une coalition d’États pour la liberté des médias, des accords avec des Cours de justice et l’organisation de Formations sur l’alphabétisation et les médias d’information.
Le Réchauffement climatique
De New York – Assemblée générale de l’ONU, le Sommet sur le réchauffement climatique, la seconde Conférence sur les Océans – sont ressortis des messages forts. Il y a urgence et les atteintes à la biodiversité comme la dégradation des océans sont autant de signes d’alertes que relaient les jeunes.
Là aussi l’UNESCO voit ses activités reconnues et encouragées. Les sites patrimoniaux – naturels ou culturels – sont des centres d’observations précieux et des dispositifs qui offrent un cadre exceptionnel pour mobiliser les chercheurs qui peuvent coopérer, développer des initiatives ancrées sur le terrain en lien étroit avec les populations.
Une dizaine de zones à préserver prioritairement ont été repérées. Avec la Banque Africaine de Développement, va être créé un Fonds de soutien aux réserves de biosphère. Beaucoup est fait pour développer l’information et pour sensibiliser à toutes les problématiques qui touchent aux menaces pour nos mers et la Terre.
Des années de recherche et de coopération ont permis la publication du premier Rapport mondial sur la Biodiversité.
Les travaux de la Commission océanographique comme ceux du Programme Hydrologique International sont de plus en plus appréciés comme, par exemple, la publication récente d’un rapport sur « Océan et cryosphère ». Ils contribuent à une prise de conscience grandissante des risques que l’on encourt sur tout ce qui a trait à l’eau ; de l’intérêt ainsi, des Conférences (voir par exemple Les Conférence de l’ONU sur les océans dont la seconde édition se tiendra au Portugal en juin 2020)
La Jeunesse est partie prenante d’actions conduites dans le cadre du programme MAB (biodiversité). Elle a porté témoignage de la situation lors de l’Assemblée générale de New York avec l’intervention d’une délégation de jeunes venant de zones « en risque ». Les jeunes sont aussi visés par de nombreuses initiatives prises dans le domaine de l’Éducation en rapport avec le réchauffement climatique et le Développement Durable, deux thèmes qu’il s’agit d’enseigner et d’intégrer dans les « curricula » (programmes scolaires).
Les Questions touchant la Science et les Technologies : Diffusion, Promotion, Contribution à la Paix
Premier point : dans un monde qui se technicise de plus en plus et où les sciences, elles aussi, apportent des contributions décisives au développement, il est indispensable d’ouvrir ces domaines au plus grand nombre, pour susciter les vocations et faciliter l’appropriation des sciences et techniques au service de la société, et singulièrement en Afrique où, en la matière, les besoins sont considérables. D’où le lancement du projet « Science ouverte » qui entend promouvoir les informations sur les sciences sous un angle pratique.
Seconde préoccupation essentielle : les questions éthiques sur lesquelles l’UNESCO a un savoir-faire forgé au travers des années avec des travaux qui ont débouché sur des résultats marquants. Ont ainsi été cités trois contributions qui viennent aider comme de possibles réponses aux interrogations fondamentales que peuvent poser les Sciences et les Technologie en termes éthiques :
- Le Génome ;
- La PMA et le Réchauffement climatique… ;
- Et maintenant, c’est un nouveau projet soumis à l’approbation du Conseil Exécutif, en attendant celle de la Conférence générale : l’Ethique de l’Intelligence Artificielle. La Directrice générale n’en a pas dit plus, elle n’a pas fait d’allusion aux difficultés de certains sujets, notamment elle n’a pas parlé de la bioéthique en dehors du rappel des deux thèmes de la PMA et du Génome.
Sans rattacher son développement aux grands enjeux du moment, Mme Azoulay a consacré une partie de son intervention au domaine de la Culture, qui, singulièrement à l’UNESCO, doit s’engager pour « la Diversité dans son Universalité ». C’est cet esprit qui préside aux initiatives nombreuses et portées par une forte collaboration internationale en faveur de la reconstruction de Mossoul (reconstruction d’édifices religieux, fête du livre).
Toute une série de travaux ont été mentionnés, tous de nature culturelle, et visant à favoriser les dialogues et coopérations au service de la culture et de la Paix : actions pour préserver les patrimoines y compris le patrimoine subaquatique, promotion des industries créatives en Afrique, révision des conventions culturelles (1970 sur le trafic illicite des œuvres d’art, 2005 sur la diversité des expressions culturelles).
Deux allusions à deux sujets à la fois politiques et culturels à propos desquels on peut parler d’avancées concernant les deux Corées ou aussi, mais dans une moindre mesure Jérusalem-Est.
La Transformation stratégique et le Budget : appel aux États
La Directrice générale indique, à propos du projet « Transformation Stratégique » que l’on est sur les rails et qu’il y a un grand souci de consultation et d’information des États au sujet d’une réforme engagée en profondeur, avec une grande ambition mais aussi beaucoup de réalisme et le souci d’être cohérent.
Si, précisément, cette transformation stratégique vise à moderniser l’institution pour lui permettre d’assumer pleinement ses responsabilité, il y a lieu de lui fournir des moyens suffisants, et comme cela a déjà été dit précédemment, il faut bien avoir conscience qu’au fil des années la situation s’est dégradée. L’effort des États (notamment pour compenser les effets du départ des États-Unis) et les remarquables succès des opérations de financement extra budgétaire (+40% entre le premier semestre 2019 et la période correspondante de 2018) ne doivent pas laisser se nourrir d’illusions. On doit pouvoir compter sur un budget ordinaire suffisant. Les financements extra-budgétaires ne sont pas appelés à se substituer à ce qu’apportent les États au titre de leur dotation « réglementaire », votées par la Conférence générale. C’est la raison pour laquelle la Directrice générale a invité les délégués à opter pour le troisième des scenarii soumis à leur décision, à savoir celui qui garantit l’enveloppe la plus élevée (534,6 millions de dollars).
C’est sur cette dernière considération que la Directrice générale a conclu son interventions en donnant à son propos l’accent d’un appel vibrant : l’UNESCO est une réalité vivante, qui va de l’avant avec un outil exceptionnel au service du Bien Commun. « Il y a une demande d’UNESCO nous dit t-elle, une demande qu’on entend exprimée partout sur le terrain. Il y a un personnel enthousiaste et motivé, alors sachons préserver cette dynamique en restant unis et mobilisés, en partageant tous les mêmes intérêts communs… » « Nous le devons à la Jeunesse », qui sera le fil directeur de notre prochaine Conférence générale, et pour « être à la hauteur des défis auxquels l’UNESCO est confrontée ».