A l’occasion de la conférence internationale « Patrimoine et Diversité culturelle en péril en Irak et en Syrie », qui s’est tenue le 3 décembre 2014, Irina Bokova a dénoncé la volonté de « nettoyage culturel très réfléchie ».

L’importance de cette conférence internationale était marquée par la participation effective d’Irina Bokova et d’un certain nombre de personnalités venues du Moyen-Orient, des États-Unis, de l’ONU etc…. et la salle II était entièrement remplie.

Irina Bokova ouvre la séance. Elle s’est rendue en Irak, et peut témoigner qu’il s’agit d’une volonté de destruction systématique de la vie d’un peuple : une volonté de « nettoyage culturel très réfléchi », et que dès lors la solution n’est pas uniquement militaire.

Mme Irina Bokova, Directrice générale de l’Unesco

Mme Irina Bokova,
Directrice générale de l’Unesco

L’état des lieux fait par les orateurs a porté sur la description de toutes les destructions des signes culturels et religieux en Irak et en Syrie laissés depuis 6 000 ans et qui sont l’image de l’acceptation du « vivre ensemble » depuis des temps reculés.

Les actions de DAESH visent à éradiquer toute culture et tout patrimoine historique qui s’y rattachent, et à créer des contradictions entre les différentes communautés qui jusqu’à maintenant vivaient dans la connaissance historique de ce qui pouvait les rapprocher. Bien entendu, la destruction des religions ou la création d’hostilités entre elles fait partie de ce plan.

Ce « nettoyage ethnique et culturel » a été abondamment décrit par les orateurs. Il porte donc sur la volonté de destruction systématique des constructions, monuments et œuvres d’art accumulés dans cette région depuis des siècles, voire des millénaires, en vue de « dé-confessionnaliser » les religions en Afrique. Certains ont parlé de l’instauration de « laboratoires de haine des minorités », destinés à détruire la « culture de voisinage », car là où les minorités sont marginalisées le fanatisme va de l’avant. Cette destruction porte donc non seulement sur la culture exprimée par ces patrimoines historiques mais aussi sur les identités et les religions qui en étaient l’expression.

A cet égard, certains orateurs ont évoqué une tendance, qui se retrouve un peu partout dans le monde actuel, à savoir qu’en raison de la dévalorisation des « valeurs » politiques certains groupes ou idéologues en sont venus à vouloir s’appuyer sur le religieux, non dans son essence et sa vérité, mais en faisant des emprunts sur ce qui pourrait servir leurs convictions. Ainsi, l’ambassadeur Morel a-t-il dénoncé la responsabilité des politiques pervertissant les valeurs religieuses au service de leurs seuls intérêts.

Que faire ?

La guerre et la force ne sont pas du domaine de compétence de l’Unesco, et cela ne sera sûrement pas la seule solution. Il s’agit de restaurer la culture par l’éducation dès la petite enfance.

Cette éducation doit porter sur la restauration de la culture de voisinage et la nécessité de la réconciliation, et sur l’éducation aux religions. Il est à noter que dans les territoires contrôlés par DAESH, (l’EI ?), des écoles de déconstructions culturelles sont déjà en place.

Par ailleurs, des intervenants spécialisés dans la gestion des musées et la protection des œuvres d’art, au Moyen-Orient et dans le monde (par exemple le Metropolitan de New York) sont intervenus pour indiquer tout ce qui était fait pour la protection des œuvres d’art.

Les propos ont porté sur la mise en sécurité des pièces les plus importantes des musées exposés aux combats, et par la mise en place à l’ONU et à l’Unesco de résolutions destinées à augmenter le contrôle des mouvements aux frontières des œuvres d’art qui ne manquent pas d’être pillées et revendues dans le monde entier. Ainsi des listes descriptives sont établies et circulent parmi les spécialistes de ces marchés et des musées, mais aussi auprès des douanes et d’Interpol.

En conclusion, conférence remarquable par les prestations des intervenants. Mais les contre-feux, y compris dans l’éducation, restent largement à construire.

A retenir, en plus des faits relatés en Irak et Syrie, cette volonté qui apparaît un peu partout dans la cadre de la mondialisation, de vouloir éradiquer la transmission par la culture et les religions en vue d’instaurer, une nouvelle fois encore, les chimères d’un monde idéal et nouveau, dont nous ne connaissons aujourd’hui que la phase barbare et violente.

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