Un webinaire pour célébrer les bienfaits de la Science, évoquer des réalisations concrètes, et montrer tout ce qu’apporte le partage des savoirs, l’esprit d’ouverture, les démarches et recherches nourries de coopérations ou de collaborations pour un Bien Commun.
Evénement introduit par un message de Madame Azoulay qui a été lu par Madame Schamila Nair–Bedouelle, Sous Directrice-Générale pour les sciences exactes et naturelles qui a animé l’ échange, un échange auquel ont contribué cinq intervenants : deux pour présenter des actions précises (le laboratoire de recherche sur la chimie moléculaire de l’Union européenne, le prochain rapport de l’Unesco sur la Science à paraitre en avril 2021), et trois autres qui ont donné leur éclairage sur les Sciences sous l’angle du responsable public (l’un venant de Malaisie, l’autre du Zimbabwe) ou au travers de l’expérience et des préoccupations d’une fondatrice/responsable d’un réseau de jeunes centrés sur les questions se rapportant à la biodiversité.
Madame Azoulay, Directrice Générale de l’UNESCO
Face à la crise « Covid », on ne peut que se convaincre des apports de la Science au service de l’Humanité parce qu’elle est, selon ce qu’avait dit en son temps Claude Lévi-Strauss, un « dépassement » qui permet de progresser, et aussi, ajoutait-t-il, un moyen pour faire « se rejoindre » les Hommes. Il y a bien là les deux caractéristiques essentielles de la Science qui se trouvent mises en exergue dans le combat mené contre ce « virus total » -covid19 : la recherche scientifique avance et doit ces progrès à d’intenses collaborations associant diverses disciplines de la « Science dure » et des « Sciences humaines ».
A l’heure de cette pandémie, il faut ce front commun pour permettre des innovations et exploiter au mieux tout le potentiel que peuvent offrir les Sciences au service du bien commun dans un cadre humaniste. L’UNESCO soutient ces démarches fondées sur le partage et l’échange, la coopération. C’est dans cet esprit qu’elle vient d’émettre une Recommandation en faveur d’une « Science Ouverte » pour plus d’efficacité et de Justice, et pour une plus grande diffusion de la Culture scientifique.
Madame Edith Heard, ancienne lauréate du prix L’Oréal « Les Femmes pour la Science », et Directrice Générale du laboratoire européen de biologie moléculaire de l’Union Européenne.
En écho au message de la Directrice Générale de l’UNESCO, il nous est redit combien il est important pour la Science de miser sur les coopérations, le partage des informations et des expériences, mais aussi le dialogue avec la société.
Il est important de ne pas relâcher les efforts en matière de recherche fondamentale et d’avoir des approches ouvertes (« borderless ») ; c’est dans cet esprit que l’Europe a créé un laboratoire de recherche dédié à la biologie moléculaire, une structure disposant de six sites dans cinq pays (Royaume Uni, Espagne, France, Allemagne, Italie),et dont les Missions sont les suivantes : Recherche, Services, Formation de haut niveau, Développement technique (outils), aide à l’Intégration (licences, facilitation pour l’organisation de coopérations).
En termes d’activités, le laboratoire est mobilisé sur les questions concernant le Coronavirus, avec tout particulièrement une intensification des analyses menées à partir de ses bases de données puissamment alimentées par les informations venant des Etats (données chimiques (moléculaires), cliniques et sociales). Les travaux portent notamment sur les formations, mutations et diffusions du virus.
Les analyses portent aussi bien sur les virus pathogènes et les anticorps que sur les données touchant les patients ; elles couvrent des questions biologiques et sociales, et amènent à faire se concerter les experts de nationalités et spécialités très diverses (ingénieurs, épidémiologistes, théoriciens, ingénieurs, mathématiciens etc.).
L’objectif est d’affiner l’analyse des risques (lesquels ? les facteurs de risque ?) et de trouver des solutions. Ces recherches portent leurs fruits.
Le laboratoire organise des Conférences, des cours, des actions de sensibilisation.
Madame Suzan Scheegan, responsable éditoriale du Rapport de l’UNESCO sur la Science
Le prochain rapport sera publié en avril 2021, il traitera de l’impact (l’apport) des Sciences pour la réalisation des objectifs de l’agenda 2030. Il comportera plus d’une cinquantaine de thèmes.
En avant-première, quelques éléments ont été présentés sur un chapitre relatif au recensement des études menées dans le monde sur les questions épidémiologiques. On aura noté : une forte augmentation du nombre des travaux, cinq pays concentrent la majorité de ces études, même s’il y a bien une tendance à voir s’intensifier les recherches, ces travaux apparaissent suscités plus en mode « réactif » (après des épidémies comme celle de l’ébola ou du zirka par exemple) que de façon proactive, anticipatrice. Dernier élément mis en évidence : la montée des contributeurs venant des pays à faible revenu, les chercheurs de ces pays (venant d’Afrique principalement) interviennent essentiellement comme co-auteurs.
M Tan Sri Zakri Abdul Hamid, Professeur, ancien Conseiller scientifique du Premier Ministre de Malaisie
Il faut largement diffuser la culture scientifique partout dans le monde, pour susciter des vocations sans exclusive.
On doit investir massivement dans les Sciences, on a pu montrer qu’une bonne utilisation des outils favorise grandement et durablement le Développement. Pour obtenir les meilleurs résultats, les coopérations constituent un puissant levier. La Science aidera certainement à relever ce qui constitue les deux grands défis de notre temps : le dérèglement climatique et la perte de la biodiversité…mais dans l’immédiat c’est le combat contre le Covid19 qui est prioritaire et qu’il faut mener avec l’aide de la communauté scientifique dont les recherches fondamentales sont essentielles.
La Science pousse toujours plus loin les limites de notre ignorance, et c’est ce qu’elle fait dans l’exploration du pathogène qui nous contamine, cette lutte qu’il faut couronner de succès est un signe de civilisation, il est important qu’elle soit correctement soutenue par des politiques publiques appropriées, ce qui n’est pas forcément toujours le cas : les considérations électorales, certains travers de la société qui peuvent marquer les politiques – les egos, la cupidité ou l’apathie – sont trop souvent de nature à pénaliser le champ des sciences, un terrain qui peut être alors délaissé au profit de sujets jugés plus porteurs : l’économique ou le social.. Il y a là une question de « choix de société » qui se pose avec de possibles risques que la Science ne soit pas traitée comme il le faudrait, c’est cela que suggère notre orateur en évoquant l’éventualité et même la nécessité d’une transformation spirituelle et culturelle. Il conclut son propos en prenant à son compte une idée qu’avait exprimée l’ancien premier ministre anglais M Gordon Brown à propos de la Politique : « il faut donner à la Science tout son rôle ».
Le représentant du Ministre de l’Enseignement supérieur et du Développement des Sciences et Techniques du Zimbabwe
De nos jours plus que jamais, il importe que personne ne reste cantonné à son seul terrain d’élection ; il faut dialoguer, se concerter et coopérer. Cela est particulièrement vrai pour les Gouvernements/Pouvoirs Publics qui doivent échanger avec les experts scientifiques pour étayer leurs décisions là où leur rôle s’impose comme une évidence. A cet égard, la crise du Covid est une parfaite illustration de cette exigence, les scientifiques apportent des données et des explications qui répondent à un réel besoin : savoir, comprendre, et finalement pouvoir justifier de décisions auprès des citoyens, des citoyens qu’il faut écouter et rassurer par des preuves.
Toute la difficulté est de pouvoir bien articuler une sorte de trilogue entre : « Gouvernements»/ « Scientifiques »/ « Citoyens » en prenant appui sur des données fiables et pertinentes.
Melina Sakiyama co-fondatrice du réseau « Global Youth Biodiversity »
Parlant au nom d’une organisation fédérant plusieurs centaines d’associations de jeunes issues de près de 150 pays et comptant près d’un million de membres/sympathisants, la dernière intervenante de ce panel a repris avec insistance beaucoup des thèmes évoqués par les précédents orateurs. Parmi les idées qu’elle a exprimées un peu comme la porte-parole de ces nouvelles générations de plus en plus sensibles aux risques de la dégradation de notre planète, on aura retenu : l’exigence de sortir des enfermements ;travailler en silo n’a plus lieu d’être, il faut partager et coopérer, avec des engagements collectifs portés aux plus hauts niveaux, comme cela s’est concrétisé en septembre dernier lors d’un sommet de l’ONU sur la biodiversité, mais aussi avec un monde de la Science qui soit à l’écoute : écoute des jeunes, écoute « des gens ordinaires », qui peuvent avoir des choses à dire et qui peuvent être détenteurs de précieux savoirs sur la Nature (voir par exemple les possibles apports des populations autochtones).
Une dimension importante et non évoquée jusque-là a été évoquée : celle de l’éthique, éthique des Sciences en particulier au sein du monde universitaire, et toujours en rapport avec les Sciences, éthique de l’information : il importe ici que les échanges et la diffusion d’information soient purgés de tout ce qui est « fake » (tendancieux, faux) et qu’un journalisme scientifique de qualité contribue au maintien indispensable de communications de qualité.
Quelques éléments en conclusion
Madame Shamila Nair-Bedouelle a rappelé les engagements forts de l’UNESCO pour la promotion de la Science, avec outre sa Recommandation en faveur d’une Science ouverte, le lancement récent d’une « Coalition pour le développement des accès aux Sciences et Techniques » qui a déjà reçu l’appui de 45 Etats. Elle a aussi mis l’accent sur tout ce que le numérique pouvait apporter à la Science, sachant que l’outil du digital ne pouvait gagner à son emploi que s’il était mobilisé à bon escient et dans un esprit de Paix, et à cet égard, il aura été fait remarquer à juste titre toute la valeur et, partant, la nécessité de ce que l’on pourrait appeler deux prérequis pour un bon développement de la Science au service de tous : l’entente et la coopération internationale (« une diplomatie scientifique ») et une Science humaniste qui ouvre ses accès équitablement, largement et pour tous.