Au carrefour des affaires du monde, le pape François s’engage pour la promotion des droits humains, le développement de la démocratie et de l’état de droit…

En un an, le changement de pape et de secrétaire d’État a redonné des couleurs à la politique étrangère du Vatican. Appuyée sur un réseau de près de 180 ambassadeurs – autant que de pays avec lesquels le Vatican entretient des relations diplomatiques – la diplomatie de l’Église fait un grand retour sur la scène internationale. Les nombreux voyages du pape prennent de plus en plus une dimension géopolitique majeure.

Le pape François s’est entouré au Vatican de vrais professionnels et les résultats sont là : très politiques et bien dosés, les récents voyages du pape argentin au Parlement européen et au Conseil de l’Europe mais aussi en Jordanie, dans les territoires palestiniens et en Israël comme en Turquie ont révélé un homme habile et averti, engagé au cœur des dossiers les plus brûlants, reconnu comme fin stratège et devenu une référence au sein du club très fermé des grands dirigeants de la planète.

En visite officielle à Strasbourg ce 25 novembre au siège du Parlement européen, vingt-six ans après l’unique visite d’un souverain pontife dans l’hémicycle, celle de Jean-Paul II en 1988, François, comme il est appelé simplement, a abordé les thèmes chers à son pontificat mais qui sont aussi au cœur de l’agenda politique européen : le travail, l’environnement, l’immigration et la famille.

Sa grande force : il est avant tout ce qu’on attend de lui, un homme de DIEU qui parle et se réclame de Lui sans compter.

« C’est l’oubli de Dieu et non sa glorification qui génère la violence ».

« L’Europe doit être capable de faire un trésor de ses propres racines religieuses : ainsi elle sera exempte de tous les extrémismes qui se répandent dans le monde moderne, à cause, entre autres, du grand vide auquel est confronté désormais l’Occident ». 

Le Vieux Continent, est devenu, selon lui une « grand-mère ayant perdu sa fertilité et sa vivacité : les grands idéaux qui l’ont inspiré ont perdu leur force de conviction et d’attraction au profit du technicisme bureaucratique de ses institutions » …

Sous une salve d’applaudissements malgré ces propos iconoclastes, le pape a encore mis en garde le peuple européen contre les affres de l’individualisme et d’un consumérisme exacerbé, affirmant au contraire que « la dignité des personnes signifie reconnaître le caractère précieux de la vie humaine, laquelle ne peut être considérée comme un objet d’échange ou une marchandise ».

« L’absence de soutien réciproque à l’intérieur de l’Union européenne, instance distante des citoyens, risque en outre de mettre en place des solutions particularistes au problème récurrent des migrations, expédients qui ne tiennent pas compte de la dignité humaine des immigrés, en favorisant l’esclavagisme et les tensions sociales ».

Et, dans une formule lapidaire, il résume la pensée commune : « Nous ne pouvons tolérer que la mer Méditerranée devienne un grand cimetière ».

La visite du Pape dans des pays de culture musulmane était enfin un défi sérieux, surtout dans un contexte de violence régionale et de crispations identitaires : il était attendu avec méfiance sur la question de la paix, des réfugiés, et du dialogue interreligieux. (On se souvient du faux pas de Benoît XVI, qui, s’interrogeant sur le rapport entre foi et raison, s’était référé à une controverse de la fin du Moyen Âge, donnant ainsi l’impression d’associer islam et violence). En Israël et en Cisjordanie, le pape jésuite a invité — initiative sans précédent — les présidents israélien et palestinien, Shimon Peres et Mahmoud Abbas, à une réunion commune de… prières, dans ce qu’il a appelé sa « maison » de Rome. Une maison, c’est synonyme de convivialité là : il n’y règne pas de rapport de force….

Enfin, en Turquie, laboratoire politique d’un islam à plusieurs visages, le pape était attendu avec intérêt. Son capital de sympathie y est élevé : il incarne pour les responsables des confréries soufies, l’idéal des derviches, au sens spirituel d’abord, puis surtout humain.

Avec ses 58 prêtres et ses 53 000 fidèles, l’Église catholique de Turquie a la modestie d’un diocèse rural français, mais elle a l’ampleur d’un passé immense avec l’apôtre saint Paul et une vocation interreligieuse unique.

La singularité de la Turquie s’exprime par sa diversité mais plus encore par la nature de son islam politique. A la différence d’autres pays musulmans du Proche et Moyen-Orient, l’islam turc a intégré très tôt les principes de l’élection et du compromis démocratique ; il n’y a toujours aucune référence à l’islam dans la Constitution, comme cela est courant, sinon la norme, dans les pays arabo-musulmans.

C’est pourquoi le discours du pape qui prône « la redécouverte du patrimoine historique, la vivante multipolarité du monde arabe et le phénomène de transversalité en dialogue », a été particulièrement bien perçu dans ce pays qui reste un acteur incontournable dans le monde musulman.

Sur les débats de sociétés comme sur les questions internationales, François est prophète dans tous les pays…