Lors de la séance de clôture, M Sobhi Tabwil, directeur à l’UNESCO en charge de la Prospective de l’Education (cf le grand projet « Les Futurs de l’Education ») a récapitulé les principales idées ressorties des trois journées d’échange sur ce thème de l’apprentissage mobile, un domaine qui révèle toute son importance à l’aune de la « crise Covid ». Par ailleurs, plusieurs autres éclairages ont été donnés venant du Ministre de l’Education de l’Equateur et de six représentants d’organisations impliquées dans le domaine « Education et Technologies » à savoir la Banque Mondiale, l’agence onusienne pour les Télécommunications, l’UNICEF, l’organisation intergouvernementale du sud-est asiatique dédiée à l’Education (SEMEAO) ainsi que deux Institutions éducatives (DUBAI CARES et PROFUTURO). Ce dernier échange a permis de montrer les efforts conduits par la communauté internationale sur ce terrain porteur des technologies au service de l’éducation et leurs enjeux sous-jacents. Mme Stefania Giannini est intervenue en conclusion.

Au terme de « semaine de l’apprentissage mobile » on peut faire ressortir des points saillants qui pourront alimenter les réflexions fondamentales actuellement menées à l’UNESCO et en d’autres instances sur l’avenir de l’Education.

La crise Covid aura été un choc majeur pour tous les systèmes éducatifs, et un révélateur d’inégalités mais aussi parfois d’impréparation dans les mesures prises pour préserver les liens des apprenants avec les institutions d’enseignement : les fractures et les déficiences restent béantes.

  • Inégalités d’accès aux outils de téléenseignement ( e-learning) : 90% d’élèves/étudiants ont pu préserver un lien avec leur apprenant dans les pays développés, à peine 25% pour les pays en développement ;
  • Fortes inégalités de compétence à l’usage des outils entre Riches et Pauvres, Urbains et Ruraux, Garçons et Filles, etc. ;
  • Inégalité dans la qualité des contenus mobilisés pour le travail en ligne.

Les besoins sont immenses, qu’il s’agisse de la capacité à faire face aux temps de crise (besoin de résilience, continuité) ou plus généralement de l’adaptation des institutions éducatives à de nouvelles approches avec un usage approprié des nouvelles technologies dont le déploiement à mener systématiquement suppose des efforts considérables (plusieurs centaines de milliards de dollars) en matière d’infrastructures et de réseaux mais aussi de formation ou de sensibilisation.

Tout à fait naturellement, on a fait ressortir avec force le bienfait et partant la nécessité de réformes avec plus de numérique, des réformes profondes, pour des systèmes appelés à basculer pour de bon dans un nouvel environnement : d’où l’insistance réitérée par plusieurs intervenants à propos de la notion de connectivité (cf le projet GIGA de l’agence internationale des Télécommunications en lien avec l’UNICEF et l’UNESCO qui vise à relier au réseau des dizaines de milliers d’écoles), mais tout ici ne saurait se  limiter à une dimension technique, la connexion n’est pas tout dans les relations qui se nouent entre apprenants et enseignants.

La dimension relationnelles/personnelle est essentielle :

  • D’abord pour avoir un bon usage des techniques : importance alors des formations des enseignants, mais aussi des élèves ou étudiants et, ce point a plusieurs fois été mentionnés, des parents.
  • Ensuite et surtout, pour rappeler que le numérique/la télétransmission/l’apprentissage à distance ne résoudront jamais tous les problèmes, il y aura toujours besoin d’espaces physiques permettant de préserver vraiment le lien entre communautés éducatives et apprenants, l’épanouissement des jeunes pour qu’ils bénéficient d’une éducation de qualité est à ce prix.
  • A propos de la dimension humaine, on aura relevé la question des vulnérabilités, qui sont nombreuses et persistantes. On les a citées à de nombreuses reprises à propos des populations déplacées, de la petite enfance, des jeunes filles, des handicapés notamment, et, quand bien même on a conscience des difficultés et des limites des outils numériques pour réduire ces grandes fragilités, on a montré aussi leurs apports précieux pour obtenir des résultats, surtout en temps de crise mais pas seulement.
  • Enfin on reprendra quelques mots-clefs très fréquemment repris pour caractériser/ qualifier les évolutions qui se dessinent avec, c’est incontournable, une plus forte dose d’outils nouveaux, reposant largement sur les technologies du numérique et des télécommunications : flexibilité, inclusion, approches partenariales et holistiques, échanges de bonnes pratiques, équité, coopération et soutien international (cf la Coalition Mondiale pour l’Education).

Stefania Giannini dans son propos conclusif s’est félicitée de l’intensité des échanges au cours de ces trois journées :

On ressent, nous dit-elle, qu’avec l’aide des nouveaux outils du numérique de réels changements sont possibles, que ces innovations vont pouvoir donner plus de souffle pour des changements radicaux dans le domaine de l’Education qui devront ne laisser personne de côté…

On ne peut que souscrire à cette note d’espoir, mais, comme on aura pu le noter au travers de certaines interventions, les chantiers à mener sont énorme, et nécessiteront de bien traiter des questions essentielles non purement techniques qui, sans avoir été l’objet principal de cette Conférence, ont tout de même été abordées allusivement : le contenu des programmes dans de nouveaux environnements et les méthodes d’enseignement dans des approches reposant sur les nouveaux outils pour l’éducation à distance, l’évaluation des « performances » des systèmes mis en place, mais aussi l’appréciation des élèves/distants, la place du professeur (simple « coach » ou toujours « le maître » ?), les marginalisés du numérique, les décrocheurs etc.

Reste aussi à parler des Valeurs : quelles sont-elles ? quelles deviennent-elles dans le monde nouveau dans lequel l’Education est entrain d’entrer ?

Assurément, l’Ecole, terme pris au sens large, ne saurait voir son avenir assuré par sa pleine intégration aux réseaux (« la connectivité ») et par le seul usage des outils du numérique (PC Tablettes et autres smartphones, MOOC etc.).