Réunion instructive au cours de laquelle beaucoup d’informations ont été communiquées sur un thème – la Transversalité – qui ressort de plus en plus comme une exigence au moment où s’engagent les travaux pour définir les nouvelles orientations à moyen terme de l’UNESCO (2022-2024) dans le cadre de la grande transformation stratégique de l’institution (pilier 3) et de l’ONU.

Les consultations déjà menées ont déjà évoqué cette thématique, cette réunion uniquement consacrée au sujet « Transversalité » s’est voulue plus concrète et précise avec trois interventions. La première tenue par M Jean-Yves Le Saux, Directeur du Bureau de la stratégie et de la planification, a porté sur « l’histoire de la transversalité » à l’Unesco. Les deux autres produites par les ADG des secteurs Education et Science ont traité de la transversalité dans leurs domaines respectifs, avec en particulier une restitution de leur participation à la dernière AG de l’ONU qui apparaît comme une bonne illustration de ce qui peut résulter d’échanges transversaux (entre agences, entre institutions multilatérales et les Etats).

Le directeur du BSP a introduit la séance en rappelant un certain nombre d’idées émises à New York (AG de l’ONU de septembre 2019) ou à Davos par M Antonio Gutierrez, qui a rappelé la gravité de la situation présente avec d’immenses défis globaux auxquels les gouvernements répondent de façon excessivement fragmentée. C’est pour porter remède à ce dangereux contraste que le Secrétaire Général a engagé une réforme fondamentale du système onusien avec un appel à une réforme d’envergure portée par une stratégie mettant en exergue quelques maîtres-mots : l’approche globale, une unité d’action, le souci de l’intégration et/ou de la transversalité pour plus d’efficacité et avant tout un engagement fort des Etats pour soutenir des objectifs communs, partagés avec ceux de l’agenda 2030 comme repère essentiel.

De façon plus pratique, quatre thèmes ont été mis en évidence : appel à être très clair et précis dans les documents définissant les orientations (cf le C4), réviser la présentation des données budgétaires (cf C5) pour faire ressortir les nouveautés (comme par exemple tout ce qui est fait au titre des actions transversales), développer les partenariats notamment pour la mobilisation des ressources, et enfin se soucier de bien identifier les « marques » en particulier la marque UNESCO au sein de l’ONU.

Un bref historique : vingt années d’expérience de la Transversalité (Jean-Yves Le Saux)

Sur les 20 dernières années, les orientations de l’Unesco ont introduit des objectifs de nature fondamentalement transversale :

– 2002-2007 : L’éradication de la pauvreté et la Contribution des technologies de l’information pour le développement d’une société des connaissances.

– 2008-2013 : L’Afrique et le Genre et, à ces deux nouvelles priorités, est venue s’ajouter le lancement de Plateformes intersectorielles. En termes de management, ont été approfondies les approches interdisciplinaires, et les modes de gestion des plateformes ou projets (désignation de responsable ADG pour les plateformes et développement de Comités de pilotage).

– 2014-2021 (l’actuel C4) : Sélection de 9 objectifs stratégiques centrés sur les domaines de compétence. Exemples : pour l’Education, « Développement de systèmes éducatifs de qualité, inclusifs, couvrant les apprentissages tout au long de la vie » ; ou pour la Culture, « Promotion, Protection et Préservation des Patrimoines ».

Sur cette même période, il a été mis fin aux Plateformes, (14 initialement puis 12), et s’y sont substituées des Stratégies intégrées (par domaine), l’idée sous-jacente étant de renforcer les engagements des parties prenantes et de combattre des orientations trop spécialisées (lutter contre l’unidimensionnel).

Par ailleurs, trois grands sujets ont émergé comme des thématiques à dimension transversale de très grande importance (stratégique) : le Climat avec un suivi assuré par un comité de pilotage, la Jeunesse voir l’initiative « Net Med Youth » et les Forums et le Plan d’action pour les Petits Etats Insulaires en Développement (PPEID).

L’Education

L’ADG du secteur Education, en faisant référence aux rencontres dans le cadre de l’AG de l’ONU et à d’autres événements passés ou à venir en rapport avec l’Education, a montré à quel point ce domaine essentiel gagne à se conformer aux principes directeurs maintenant promus dans le cadre onusien : il faut envisager des approches « holistiques », croiser les regards, et coopérer entre secteurs lorsque l’on traite « de la citoyenneté », du « réchauffement climatique », « de la violence » sous l’angle éducatif.

C’est dans le même esprit de transversalité, que va être engagée une réflexion sur l’avenir de l’éducation.

Des réunions de New York, sont ressorties d’autres préoccupations renvoyant elles aussi à des principes de coopération :

  • Nécessité de mieux organiser la collecte des données pour un suivi multidimensionnel des objectifs (création d’une « coalition mondiale » pour un meilleur suivi de l’éducation) ;
  • Organisation d’un dialogue stratégique permanent entre les Agences onusiennes en rapport avec l’Education ;
  • Développement des partenariats avec tout à la fois le souci de mieux promouvoir l’Education, enjeu essentiel de nos sociétés, et de mobiliser plus de ressources. On a souligné à cet égard le lancement d’un Forum mondial de l’Education qui réunira les Agences multilatérales, les donateurs et le secteur privé.

Quelques autres sujets portés par le secteur Education ont été mentionnés comme exemples de coopération entre secteurs : l’éducation artistique, le Patrimoine, les qualifications et la reconnaissance des diplômes, l’enseignement à destination des migrants, le développement durable.

Les Sciences

La représentante du secteur Science a elle aussi évoqué les réunions de New York en citant tout particulièrement les événements auxquels l’Unesco a pris part sur les questions scientifiques.

Elle a fait allusion au discours de M Gutierrez et à son appel vibrant pour que les actions soient menées avec plus de réalisme pour relever les défis du réchauffement climatique.

Il a été rappelé le rapport du GIEC publié à l’occasion des rencontres onusiennes, un rapport auquel les travaux conduits par l’Unesco font un bon écho avec tout ce qui est fait, notamment dans le cadre du MAB (la biosphère) ou de la COI (océanographie) ou encore du PHI (Programme hydrologique international).

Bilan positif de ces occasions de rencontre qui ont permis de donner plus de visibilité au sujet de l’Unesco dont, curieusement, les activités ne sont pas toujours bien connues. A titre d’exemple, on nous a rapporté la marque d’intérêt suscitée lors d’une rencontre avec des représentants du forum des jeunes du MAB qui, venus de régions en risque (exemple : l’Amazonie), ont témoigné de leurs expériences personnelles en rapport avec la biodiversité et la préservation des savoirs autochtones. Ils se sont exprimés comme des avocats d’une cause préoccupante, avec ces zones menacées qu’il faut défendre en adoptant des approches globales et intégrées où la science doit avoir toute sa place, science qu’il faut écouter et qui doit être enseignée.

Le second sommet sur « l’Accord pour le Climat » tenu en marge de l’Assemblée Générale de l’ONU a décidé d’engager collectivement les réflexions au travers de neuf regroupements (ou Coalition) auxquels le secteur Science s’est associé. Neuf thèmes ont ainsi été retenus comme, par exemple : « la mobilisation des jeunes », « la résilience », « les solutions nationales » ou « les facteurs sociaux et politiques ».

Autres événements auquel l’Unesco a pris part : un groupe consultatif sur « les moyens de mettre en œuvre la Science au service du Développement Durable », une manifestation de « l’Alliance pour la forêt vierge », et une réunion de haut niveau des PPEID sur le « Samoa Pathway » (les risques naturels propres aux petits états insulaires).

Toujours à propos du Climat, quelques développements ont porté sur la Stratégie que conduit l’Unesco en la matière. Cette stratégie, déjà bien engagée, sera affinée dans le prochain C4 en intégrant les thèmes suivants : interdisciplinarité pour l’organisation des collectes de données, inclusivité, diversité, éthique, rôle des océans, impacts sur les populations.

Deux derniers éléments d’informations que l’on aura notés :

  • L’importance des « sites désignés » que l’Unesco protège et qui sont autant d’observatoires des phénomènes qui affectent les patrimoines matériels ou naturels : 600 Aquifères, 747 Géoparcs, plus de 1000 Patrimoines ;
  • Après 2019 où le Climat aura été le thème mis en exergue, en 2020 l’accent sera mis sur la Diversité.

Débats

A la suite de ces trois interventions saluées pour leur richesse en termes d’informations, un assez grand nombre de questions ont été posées par l’auditoire.

On en donne un simple aperçu ci-après :

  • Quelle place donne-t-on aux problèmes que connaissent les « Femmes en milieu rural » ?
  • Les jeunes comment voit-on leur implication ?
  • Les données : quelle étendue d’accès ? Avec quelle finesse d’information ?
  • Peut-on (re)dire les retombées effectives des réunions de New York ?
  • A propos de l’un des projets du secteur Education : le titre d’une des réflexions proposées, est-ce l’avenir ou les avenirs de l’Education ?
  • Concernant les questions climatiques, n’oublie-t-on pas le clivage qui existe entre les pays riches et les pays en développement ?
  • Ne faudrait-il pas maintenant ajouter le Climat comme un objectif stratégique majeur de l’Unesco ?
  • Pour relever les défis globaux, on donne souvent deux réponses : renforcer l’efficacité et diffuser les connaissances. C’est notamment ce que l’on a dit pour soutenir l’alphabétisation : comment assurer en la matière la plus grande efficacité ?
  • A propos de l’organisation des dialogues et de la coopération, comment envisage t-on l’articulation des rôles au sein de l’Unesco et entre les Agences ?
  • Comment dans le prochain C4 fera-t-on ressortir les principales priorités pour obtenir un maximum de retombées ?

Parmi les réponses données on en retiendra deux qui concernent le mode de fonctionnement de l’Unesco :

  • Les retombées de New York au plan pratique peuvent être résumées autour des mots suivants : la visibilité, la transversalité, les partenariats et l’Evaluation ;
  • Entre le C4 et C5 on pourrait dire que les deux documents sont à profondément repenser, mais si on raisonne au plan de la gestion, c’est plutôt le C5 qui doit être retravaillé pour que l’on appréhende bien (ou mieux) ce qui touche aux actions à mener maintenant de façon de plus en plus transversale, étant observé que dans leurs grandes lignes les activités sont relativement bien cernées.